Transition écologique : neutralité carbone 2050

Le GIEC nous indique que nous devons avoir une diminution de 80 % de nos émissions en Gaz à Effet de Serre (GES) à horizon 2050 pour avoir un réchauffement climatique limité à 1.5 °C en 2050 et qui reste contenu jusqu’en 2100. Qu’est-ce que cela signifie ?

Actuellement un français émet environ 10.8 TCO2e/an ( si l’on considère l’empreinte carbone, c’est-à-dire les émissions françaises et les émissions dues aux produits importés ). L’objectif chiffré de réduction conduirai vers une émission de 1.8TCO2e/an.

Est-ce que individuellement, il est possible de réduire aussi drastiquement son émission de CO2e ?

Voici la répartition des émissions de CO2 en 2018 pour la France :

On note une prépondérance de l’utilisation de l’énergie, et dans le transport, cela correspond à environ 50% du transport particulier.

Les transports, le logement et l’alimentation contribuent aujourd’hui et demain massivement à l’empreinte environnementale des ménages français. Par ailleurs, les consommations d’électricité liées au développement des technologies numériques, comptabilisées ici dans la catégorie logement, explosent. La maîtrise des impacts environnementaux de ces produits et services est donc très importante pour l’avenir. En outre tous les impacts environnementaux ne sont pas comptabilisés dans l’analyse quantitative, notamment l’enjeu matière disponible et épuisable.

Sur les transports

En ne prenant plus sa voiture individuelle pour effectuer les 15000 km en moyenne, cela fait diminuer de 3 Tco2e / an son émission. Seulement pour se déplacer, il faudra prendre en compte les émissions lors du transport en commun et la location possible d’un véhicule électrique ou hybride pour les déplacements longues distances possible.

Augmenter le taux d’occupation des voitures de 50% (de 1,5 à 2,2 passagers/véhicule), grâce au covoiturage, permettrait de réduire l’empreinte carbone totale de la consommation des Français de plus de 3% .

Augmenter la flotte des transports collectifs types taxi utilisant les véhicules électriques. Ces véhicules collectifs devant être les seuls autorisés à circuler dans les métropoles. Les voitures particulières étant soumises à un système de péage urbain. Mettre en place un système de transports collectifs depuis les espaces rurals vers les centres villes, zones d’emploi.

Sur l’habitat

Le principal levier est l’acceptation. Car en effet, une politique de l’habitat devra être mise en place par les pouvoirs publics.

• Adopter des modes d’habitat adaptés à des modes de vie plus sobres en énergie et en lien avec la réduction de la taille des ménages

– Rééquilibrage de la part des maisons individuelles dans les constructions neuves au profit du petit collectif (50 / 50 à 2030, contre 58 / 42 aujourd’hui).

– Réduction de la consommation de ressources et d’espaces. La surface artificialisée a augmenté environ 3 fois plus vite que la population au cours des deux dernières décennies 18% des surfaces artificialisées correspondent à des sols bâtis (maisons, immeubles…), 48% à des sols revêtus ou stabilisés (routes, parkings …) et 34% à d’autres espaces (jardins, chantiers…). Cette pression accrue sur les sols et l’espace s’explique par la conjugaison de plusieurs facteurs : l’augmentation du nombre de ménages mais surtout l’agrandissement des logements et des espaces attenants, ainsi que l’essor de l’habitat individuel, en particulier dans les zones rurales.

– Développement des pratiques d’habitat partagé et de mutualisation avec ses voisins des espaces communs comme les chambres d’amis, la laverie, le garage, le jardin… qui pourraient représenter 10% du marché neuf en 2030.

– Réduction de la surface des logements neufs, en lien avec l’évolution des modes de vie (familles recomposées, vieillissement population…) : de 115 à 100 m2 dans les maisons individuelles neuves, de 67 à 64 m2 dans le collectif pour une famille « moyenne » en 2030.

Les tailles des ménages se réduisant structurellement, la tendance à l’augmentation de la taille des logements en m2 résulte sans doute plus de l’augmentation du niveau de vie et du choix d’investir dans son espace privatif. Il semble qu’avec des solutions d’habitat partagé, on puisse aller vers des surfaces en moyenne plus petites par personne, sans pour autant réduire le confort individuel et même en améliorant l’accès à de nouvelles fonctions des logements (disponibilité d’espaces communs nouveaux …).

• Améliorer le confort et l’efficacité thermique du parc de logements – Accroissement du rythme des constructions neuves, sobres en énergie (atteinte de 500 000 logements neufs performants par an en 2017, puis retour progressif à 350 000 en 2030).

– Limitation des besoins énergétiques des bâtiments par des rénovations performantes (plus de 500 000 rénovations performantes/an à partir de 2017) et formation de l’usager à la maîtrise de la dépense énergétique par la compréhension et le « pilotage » de son logement, comme il peut le faire pour d’autres produits (efficacité active).

– Diminution des impacts liés à la climatisation (réduction des fuites de fluides frigorigènes, en 2030, mise sur le marché uniquement de produits à faible GWP72 (inférieur à100)). Articuler de meilleures pratiques d’utilisation de son logement (pilotage automatique, gestes quotidiens…), avec la performance intrinsèque de ce dernier, est indispensable dès lors que l’on se dirige vers un parc de logements de plus en plus rénové. C’est en combinant ces évolutions technologiques avec des modes « d’habiter mieux », que le confort et les économies d’énergie seront au rendez-vous.

• Réduire l’impact environnemental des techniques et matériaux de construction-rénovation

– Augmentation des constructions avec du bois produit localement : doublement des constructions neuves en bois en 2030, en maison individuelle (20%), comme en collectif (2%).

– Baisse des puissances unitaires des équipements de chauffage (économie de matière sur les équipements de chauffage de 1% par an de 2012 à 2030).

– Réduction des taux de fuites dans les équipements thermodynamiques (de 6 à 3% par an en 2030).

Sur le volet alimentaire

La consommation de gasoil par kilogramme de produits transportés est identique pour un aller retour en voiture individuelle au supermarché situé à 5 km (pour 30 kg de courses) et pour un trajet de 800 km en camion (15 tonnes de produits transportés pour une consommation de 36 litres/100 km) ! Il faut donc être vigilant sur les modes d’approvisionnement des denrées alimentaires. Privilégier les achats locaux, hors zones d’hypermarché. Mieux vaut aller chercher ses légumes chez des producteurs locaux que dans les zones d’hypermarchés.

Le régime alimentaire des Français a suivi la transition nutritionnelle caractéristique des pays développés : les Français consomment ainsi en moyenne moins de céréales mais plus de viande, de fruits et légumes et de produits laitiers qu’en 1950 (figure ci-dessous) et plus de produits transformés (doublement depuis les années 60). L’évolution de ce régime, aujourd’hui trop riche en sucres et graisses, par rapport aux recommandations sanitaires et à notre mode de vie sédentaire notamment, vers des régimes plus proches des recommandations nutritionnelles, constitue un enjeu de santé publique au regard du développement de pathologies liées à l’alimentation telles que l’obésité.

– Amélioration nutritionnelle et environnementale du régime alimentaire des Français : par la réduction de la consommation de viande (-70% par individu moyen), la hausse de la consommation de céréales et la baisse de la consommation de boissons embouteillées (alcool, boissons sucrées, eau). – Adoption de régimes alimentaires plus calés sur les produits saisonniers.

– Réduction du gaspillage alimentaire de 60% sur l’ensemble de la chaîne alimentaire. De la production et de la transformation en ne respectant pas le dictact de la non-conformité aux « standards » (calibration des fruits par exemple). Et à la maison, en utilisant principalement des aliments frais et en quantité utile pour une semaine.

– Cela entraîne mécaniquement la baisse des déchets, émetteur aussi de GES.

– Amélioration des pratiques agricoles : favoriser des pratiques agro-écologiques permettrait une baisse de 15% des émissions unitaires de N2 O et CH4 .

– Amélioration des procédés dans les industries agro-alimentaires et la chaîne de distribution, notamment dans une approche d’écoconception générale, se traduisant par une amélioration de l’efficacité énergétique des industries agro-alimentaires, un découplage entre les quantités de produits et des emballages, etc.

– Développement des productions sous label, notamment le label agriculture biologique, dans une logique de passage de performance quantitative à qualitative.

– Utiliser un régime de consommation de viande 1 à 2 fois par semaine, réduit de moitie l’émission de CO2. Une étude anglais de l’université de Oxford a ainsi calculé à 3,81 KgeqCO2 pour les végétariens (qui consomment des oeufs et du lait) et 4,07 KgeqCO2 pour les individus mangeant environ de 50 grammes de viande sur 2 jours. Les consommateurs de viande atteignent eux les 7,19 KgeqCO2. Mais attention, un régime végétariens pour l’ensemble de la population de la planète utiliserai une surface de terre plus importante que celle d’une population ne mangeant que très peu de viande.

Consommation de produits hors alimentaire

– Réduire la consommation d’énergie pour la production et les usages des biens d’équipement de la maison et des appareils de communication : en réduisant l’énergie grise, c’est-à-dire celle nécessaire à la fabrication des produits, et en réduisant l’énergie consommée directement par les ménages eux-mêmes.

– Réduire la consommation de ressources naturelles (minerais métalliques, eau, biomasse, sol…) nécessaires à la fabrication des divers produits (textile, meubles, équipements électriques et électroniques,…). En particulier, il existe un risque avéré de pénurie en métaux rares utilisés dans les appareils électriques et électroniques ainsi qu’en métaux courant (Fer, Cuivre, …)

– Prévenir la production de déchets (notamment de produits chimiques dangereux) et recycler au mieux les appareils électriques et électroniques, les vêtements ainsi que les chaussures, et les meubles.

– Diminuer les risques sanitaires liés aux expositions aux substances chimiques, présentes dans les produits phytosanitaires pour le jardin, les nettoyants ménagers, les meubles, les peintures…

– Eco-concevoir les produits et augmenter leur durée de vie, en privilégiant les produits réparable et en limitant la production de produits jetables.

Avoir une démarche de sobriété d’achat.

Les loisirs

Les loisirs sont un des postes les plus emblématiques de la consommation. Ils comprennent la lecture, la musique, les sorties culturelles (cinéma, théâtre, concert), les sports, les jeux, les émissions de radio et les émissions télévisuelle, ainsi que les vacances. À cette liste assez stable depuis 50 ans, il faut ajouter aujourd’hui les pratiques numériques qui prennent une part considérable dans la plupart de ces activités.

La consommation d’électricité liée à l’écosystème digital, elle représentait 7 % de la consommation mondiale en 2017 et pourrait atteindre 12 % en 2020, selon Greenpeace. À ce rythme de croissance effrénée, la consommation électrique du numérique augmenterait de 7 % par an d’ici 2030. D’après l’Ademe, les équipements informatiques représentent aujourd’hui 21 % de la consommation d’électricité d’une entreprise de bureau… dont les deux tiers en période d’inactivité (machines en veille).

Sur 730 milliards de voyageurs-km en voiture particulière en 2010, 30% sont liés aux vacances et loisirs, 20% aux visites de parents et amis… soit quelques 50% au total ! Pour l’aérien, si « seulement » 18% des Français ont pris l’avion au cours des douze derniers mois, 64% de ces déplacements se font dans le cadre de vacances ou pour des motifs personnels.

Aligner le transport aérien sur l’objectif de l’Accord de Paris devrait donc passer par une remise en cause des hausses du trafic. Ce changement peut passer en partie par des changements de comportement individuels (voyager moins loin, moins souvent, privilégier d’autres modes), mais devra aussi passer par une régulation plus forte au niveau international pour donner les bonnes incitations et faire payer au secteur le prix de sa pollution.

En conclusion

Une orientation clé pour l’ensemble des segments de consommation étudiés consiste à privilégier la qualité sur la quantité des biens et des services, en tenant compte des besoins et capacités financières de chacun. Il faut comprendre ici la notion de « qualité » comme l’ensemble des caractéristiques d’un bien ou d’un service : performance, fonctionnalité, caractéristiques techniques supplémentaires (en l’occurrence des équipements plus efficaces), prestations de services plus « haut de gamme », produits labellisés, etc.

Une transition écologique ambitieuse implique des changements systémiques de la société, engageant tous les acteurs de l’économie et des territoires. Or, les pratiques quotidiennes des ménages évoluent dans un cadre fortement contraint, notamment par les institutions, les infrastructures et l’offre de produits. Les habitudes et routines des consommateurs sont de ce fait particulièrement difficiles à changer. Seule, une évolution en profondeur des modes de production, des institutions et des territoires permettra l’émergence de nouveaux modes de vie. Les politiques publiques d’encadrement des produits commercialisés, d’aménagement de l’espace et d’offre de transport conditionnent l’émergence de ces modes de vie.

Depuis plusieurs années, le consommateur-citoyen prend conscience des impacts de sa vie quotidienne sur l’environnement. Les recommandations portant sur les « petits gestes » à accomplir pour préserver l’environnement, sont aujourd’hui largement répandues. Bien sûr, ces « éco-gestes » ne sont pas suffisants, à eux seuls, pour assurer la transition écologique… mais il n’en demeure pas moins que l’implication des citoyens est primordiale et pose les prémisses de changements plus radicaux des modes de vie et de consommation, sur le long terme.

Des évolutions de la société, à la marge, individuelle, ne seront pas suffisantes pour une transition écologique ambitieuse à des horizons de moyen et long terme. Les évolutions technologiques, les améliorations des procédés industriels et les gestes en faveur dans l’environnement contribueront certes, dans un premier temps à la réduction des gaz à effet de serre et de la pollution de l’air et à l’économie des ressources. Mais ces changements non structurels de l’économie et de nos modes de vie, tels que nous les avons décris ci-dessus, ne nous permettront pas de nous mettre sur la trajectoire de l’objectif de moins de 2 t eqCO2 en 2050… pour ne parler que du changement climatique. Des changements plus systémiques sont nécessaires. La rareté des matières premières (eau, métaux) nous aidera probablement, mais sans ménagement.