ÉTAT D’URGENCE CLIMATIQUE : LA TERRE POURRAIT AVOIR FRANCHI PLUSIEURS POINTS DE NON-RETOUR

C’est un cri d’alarme que viennent de lancer un groupe de scientifiques. Dans une note publiée dans la revue Nature, ils estiment que la moitié des points de basculement pourraient avoir été franchis. Une situation qui provoque un « état d’urgence planétaire »« Il y a dix ans, nous avions identifié une série de points de basculement potentiels dans le système terrestre. Nous constatons maintenant que plus de la moitié d’entre eux ont été dépassés », explique Tim Lenton, co-auteur de la note et directeur du Global Systems Institute de l’Université d’Exeter (Angleterre).

Ces points de basculement, appelés « climate tipping points » en anglais, ont été introduits il y a 20 ans par le Giec, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat. Ils font référence à des seuils à ne pas dépasser pour ne pas entraîner des changements irréversibles à long terme sur la planète. Or, pour les chercheurs, neuf points de bascule ont été franchis.

Un effet domino

Parmi ces points de non-retour les scientifiques évoquent le dégel du permafrost, cette épaisse couche de glace qui couvre 25 % de l’hémisphère nord, et qui, en fondant, libère notamment du méthane, un gaz à effet de serre 30 fois plus polluant que le CO2. Les chercheurs pointent également la vague de chaleur dans l’océan qui a provoqué un blanchissement massif de coraux ou encore la déforestation en Amazonie, la plus grande forêt tropicale au monde, qui abrite une espèce sur dix.

« À notre avis, l’urgence la plus évidente est que nous nous approchons d’une cascade mondiale de points de basculement qui conduirait à un nouvel état climatique moins vivable ». Il est en effet reconnu que ces points de non-retour interagissent et provoquent un effet domino qui pourrait mener à un point de basculement à l’échelle mondiale.

« Ils spéculent un peu sur l’avenir, mais on en a peut-être besoin ». 

Dans le passé, les experts pensaient que ces points de non-retour ne pouvaient être atteints qu’à une température de 5°C supérieure aux moyennes préindustrielles. Mais ils ont depuis revu leur copie et les analyses suggèrent que ces points de basculement pourraient être franchis avec une hausse des températures de 1°C à 2°C. Or la planète s’est déjà réchauffée de 1°C.

« Ce nouveau travail a de la valeur », a déclaré au Guardian le professeur Martin Siegert de l’Imperial College London, qui n’a pas participé à l’étude. « Ils spéculent un peu sur l’avenir mais on en a peut-être besoin ». Et le scientifique Piers Forster de l’Université de Leeds d’ajouter : « J’approuve totalement leur appel à l’action. Bien que la probabilité d’un point de basculement global soit faible, les risques qu’ils identifient sont réels ».

Article en anglais : nature.com